Loi de Finances 2024 : Quoi de neuf concernant les taxes locales ?
Publiée au journal officiel le 29 décembre 2023, la LDF pour 2024 apporte son lot de nouveautés pour les bailleurs sociaux et les entreprises en matière de fiscalité locale. Un rapide panorama s’impose.
1- Taxe foncière sur les propriétés bâties.
1-1 Pérennisation du dispositif « seconde vie » pour les OLS
(LF 2024 : art. 71, III, 14° et 15° / CGI : art. 1384 C bis nouveau / CGI : art. 1391 E)
Renforcement des dispositifs visant à réhabiliter le parc locatif social ancien. Le dispositif « seconde vie » annoncé à Nantes au Congrès HLM a été pérennisé et est une alternative à la démolition-reconstruction ou à la réhabilitation classique.
Il s’agit d’une nouvelle exonération qui nécessite le respect de conditions cumulatives :
- Être achevés depuis au moins 40 ans à la date de dépôt de la demande d’agrément pour la réalisation de travaux de rénovation lourde
- Constituer depuis 40 ans des logements locatifs sociaux ou appartenir à un organisme d’HLM
- Disposer d’une étiquette énergétique avant travaux « E », « F » ou « G »
- Faire l’objet d’une décision d’agrément délivrée par le préfet du Département à compter du 1er janvier 2024 dans le but d’améliorer la performance énergétique « B » ou « A » et le respect des normes d’accessibilité, de qualité sanitaire ou de sécurité d’usage.
Si toutes ces conditions sont remplies, l’exonération s’applique l’année suivante de celle d’achèvement de l’opération unique de travaux de rénovation lourde pour une durée :
- de 15 ans pour les demandes d’agrément qui ont été déposées avant le 1er janvier 2024 ;
- de 25 ans pour les demandes d’agrément qui ont été déposées entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026.
Attention, les bénéficiaires de l’exonération ne peuvent prétendre au dégrèvement prévu pour les travaux visant la réalisation d’économie d’énergie (CGI : art. 1391 E).
Toutefois, il n’est pas fait mention du dispositif du 1391 C du CGI. En d’autres termes, il serait donc possible de solliciter des dégrèvements pour travaux PMR. Il apparaît sans doute opportun d’analyser le bilan coût/avantage des différentes possibilités d’exonérations. Par ailleurs, dans la mesure où les dégrèvements pour travaux PMR s’appliqueraient, il serait impossible de solliciter le dégrèvement pour les dépenses payées dans l’année de livraison de l’opération.
Le dispositif du 1391 C Bis du CGI sera financé par un prélèvement sur les recettes de l’ETAT afin de de compenser le manque à gagner des communes ou EPCI.
A noter le taux de TVA, sous conditions: pour les opérations éligibles: 5,5% pour le passage des étiquettes E, F G à A ou B
1-2 Exonération de la Taxe Foncière en faveur des économies d’énergies.
(LF 2024 : art. 143 / CGI : art. 1383-0 B et art. 1383-0 B bis)
Ces ajouts induits par la Loi de Finance s’articule en deux axes, les logements construits avant 1989 et ceux construits après 2009.
Pour les logements construits avant 1989, les collectivités territoriales peuvent décider, au travers d’une délibération, d’exonérer, totalement ou partiellement (50% ou 100 %), de Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), les propriétaires de logements achevés avant 1989 qui réalisent des travaux d’économie d’énergie sous certaines conditions précisées au sein de l’article 1383-0 B du Code Général des Impôts.
La Loi de Finance vient donc modifier les conditions d’éligibilité pour bénéficier de ce cas d’exonération. Le but est ici d’amplifier les efforts en faveur de la performance énergétique des logements. Comment cela se manifeste-t-il ?
Dans un premier temps est actualisé la liste des dépenses de travaux de rénovation énergétique éligibles à l’exonération de la TFPB en faveur des logements anciens, en s’alignant sur celles éligibles au taux réduit de TVA ; Dans un second temps est codifié le remplacement de la condition liée à la date d’achèvement du logement par une durée d’ancienneté fixée à plus de dix ans au 1er janvier de la première année au titre de laquelle l’exonération est applicable. Cependant, la Loi de Finance vient préciser que ces modifications n’entreront en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2025.
Pour les logements construits après 2009, les collectivités territoriales peuvent décider, au travers d’une délibération, d’exonérer, totalement ou partiellement (50% ou 100%), de Taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), les propriétaires de logements achevés après 2009 et qui satisfont, pendant une durée ne pouvant être inférieure à cinq ans, du respect d’un niveau élevé de performance énergétique globale qui doit être supérieur à celui définit pour l’obtention du label « bâtiment basse consommation énergétique, BBC 2005 » (décret n° 2009-1529 du 9.12.9 / arrêté du 3.5.7 relatif au contenu et aux conditions d’attribution du label « haute performance énergétique » / CGI : 1383-0 B bis).
La Loi de Finance est venue là aussi modifier les conditions d’éligibilité pour bénéficier de ce cas d’exonération de la Taxe Foncière.
1- 3 Taxe foncière établissement industriel
Création de l’article 1383 K du CGI: Exonération de TFPB sous conditions, des immeubles situés dans les Zones France Ruralités revitalisation mentionnées au II et III du 44 QUINDECIES A et appartenant des des établissements bénéficiant de l’exonération de CFE prévue au 1466 G du CGI.
1-4 Prorogation de l’abattement QPV pour les OLS
(LF 2024 : art. 219 / Loi n° 2014-173 du 21.2.14 : art. 30, III)
Vous le savez déjà, les QPV constituent depuis 2014, la géographie d’intervention majeure de la politique de la ville au bénéfice de laquelle se déploie la stratégie formalisée dans un accord signé entre l’État, les collectivités territoriales (communes, départements, régions) et leur groupements (intercommunalités) et d’autres acteurs institutionnels, dénommé contrat de ville.
En ce sens, la circulaire du 31 août 2023 a fixé les modalités calendaires et méthodologiques d’élaboration de la nouvelle génération de contrats de ville « Engagements Quartiers 2030 ». Les dernières violences urbaines de l’été 2023 ont ici été prises en compte.
En conséquence, les nouveaux contrats de ville pourront être signés jusqu’au 31 mars 2024 en métropole pour une application au 01/01/2025. La cartographie a donc été modifiée en hexagone. Il faudra attendre le 01/01/2025 pour une modification de la cartographie en Outre-mer.
A noter, il convient de déclarer l’ensemble des locaux situés dans les nouveaux quartiers prioritaires même si au 01/01/2025 les locaux sont exonérés de TFPB. On ne retiendra donc pour la déclaration avant le 01/01/2025 les locaux non exonérés et les locaux exonérés mais dont la fin d’exonération est comprise entre 2025 et 2030. Afin de faciliter les déclarations, il est possible de compléter le cerfa n°6668 par un tableur excel listant les invariants concernés, après avoir demandé cette possibilité auprès de votre centre des impôts. Dans le cas contraire, il faudra reporter à la main l’intégralité des invariants.
La loi de Finances 2024 prévoit également le maintien de l’abattement QPV pour les locaux qui en bénéficiaient en 2023 sauf cas d’exclusion tel que la cession ou la non attribution sous conditions de ressources.
Point bloquant potentiel : la mise à jour de la cartographie pourraient peut-être supprimer l’information du zonage de 2015-2023, avec pour effet, la non possibilité de contester la non application de l’abattement QPV sur 2023 et 2024. Gageons que les informations antérieures puissent être toujours disponible au sein du site SIG.Gouv.
Article 1383 C ter: Avec la nouvelle cartographie des quartiers prioritaires, il convient de vérifier l’éligibilité des locaux commerciaux situés en QPV (ou en limite de QPV). En effet, sous réserve de non opposition prise dans les conditions de l’article 1639 A bis du CGI, les locaux commerciaux affectés à une pure activité commerciale peuvent sous conditions faire l’objet d’une exonération de TFPB pendant 5 ans. Il conviendra de transmettre le Cerfa 6733-SD au plus tard le 31/12/2024. A noter que si l’exonération a déjà été obtenue sur la première période QPV, il est donc impossible de bénéficier une nouvelle fois de cette exonération.
2- Taxe d’aménagement: Modification des cas d’exonération de la taxe d’aménagement
(LF 2024 : art. 106 / CGI : art. 235 ter ZG, III, 1 / CGI : art. 1635 quater D, II / CGI : art. 1635 quater E, II / CGI : art. 1635 quater I / ordonnance n° 2022-883 du 14.6.22 : art. 14)
Depuis que la Direction Générale des Finances Publiques a, par une circulaire, bénéficié du transfert de la gestion de la Taxe d’Aménagement à la place de la Direction Départementale des Territoires le 12 juin 2019, ce dernier a pu être codifié au sein du CGI et du LPF par l’ordonnance du 14 juin 2022.
La Loi de Finance 2024 ajuste le dispositif en complétant l’ordonnance de 2022 concernant le transfert de gestion à la DGFIP. Ceci se matérialise par notamment par :
- Un alignement du régime d’exonération de la taxe d’archéologie préventive sur celui de la taxe d’aménagement en matière de création de surface de stationnement intégrée au bâti en projection verticale. Le but ici est d’inciter les porteurs de projets à une gestion plus raisonnée et efficiente des sols ;
- En apportant des précisions sur la mise en conformité avec le droit européen des exonérations et de l’abattement de la taxe d’aménagement relatives aux constructions et aux aménagements dans le domaine du logement social.
3- Outre-Mer: modification des conditions d’octroie des crédits-Impôts
3-1 Article 244 Quater X du CGI
- Passage à 3 ans à compter de l’achèvement des fondations du délai de d’achèvement des immeubles.
- Renforcement des critères de performances des logements réhabilités (décret à paraître) :
- Critères techniques
- Critères énergétiques
- Critères environnementaux
- L’ensemble du patrimoine de plus de 20 ans peut faire l’objet d’un crédit d’impôts en matière de réhabilitation.
3-2 Article 244 Quater W du CGI
Passage à 3 ans à compter de l’achèvement des fondations du délai de d’achèvement des immeubles.
Actualisation des articles 323-13 du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH) et suivants relatifs aux financements de travaux d’amélioration. (décret 2014-14 du 8 janvier 2024).
Sont exclus, sauf dérogation, les logements ayant bénéficié depuis moins de 5 ans d’une subvention notamment pour travaux PMR.
4 – Cotisation Foncière des Entreprises: Création des Zones France Ruralités Revitalisation
La LDF 2024 a permis la création d’une nouvelle zone de gestion, la ZFRR. Ces dernières viendront remplacer les Zones de revitalisation rurale (ZRR), les Bassins d’emploi à redynamiser (BER) et les Zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR) à compter du 1er juillet 2024 et cela jusqu’au 31 décembre 2029.
Ce tout nouveau zonage possèdera deux niveaux, un « niveau socle » et un « niveau renforcé ». Dès lors, les entreprises créées entre 01/07/2024 et le 31/12/2029 bénéficieront d’une exonération d’impôt sur les bénéfices. L’exonération est totale pendant 5 ans puis dégressive les 3 années suivantes. Logiquement, des conditions d’implantation et de taille existent. Elles dépendront bien entendu, du zonage. Par ailleurs, les communes peuvent, sur délibération, exonérer de cotisation foncière des entreprises (CFE) les entreprises qui bénéficient d’une exonération d’impôt sur les bénéfices dans les ZFRR, se calquant sur celle qui s’applique sur les impôts sur les bénéfices.
5- CET – CVAE: Report de la suppression de la Contribution sur la Valeur Ajoutée des Entreprises
La CVAE, composante avec la Cotisation Foncière des Entreprises de la Contribution Économique Territoriale. Pour être soumise à la CVAE une entreprise doit remplir deux conditions cumulatives :
- L’entreprise exerce une activité imposable à la CFE : l’activité professionnelle et non salariée est exercée à titre habituel en France. Le particulier loueur d’immeubles meublés est également redevable de la CFE.
- L’entreprise réalise plus de 500 000 € de chiffre d’affaires annuel hors taxe : peu importe son statut juridique ou son régime d’imposition.
C’est la valeur ajoutée qui sert de base de calcul à la CVAE (produits à retenir-charges imputables).
Initialement prévue comme supprimée dans le cadre de LDF 2023, il s’agit d’un rétropédalage. Cette taxe disparaîtra donc finalement en 2027. A noter que la cotisation minimum de la CVAE est elle supprimée, la moitié des entreprises soumises à cet impôt en seront donc exonérées.
En attendant sa reportée disparition, le taux maximal de la CVAE va progressivement diminuer jusqu’à la fin de l’année 2026, passant de 0,28% en 2024, 0,19% en 2025 pour finir à 0,09% en 2026. Pour contre balancer cette baisse, la taxe additionnelle pour les frais de Chambre de Commerce et d’Industrie va elle augmenter, passant à 9,23 % en 2024, 13,84 % en 2025 et 27,68 % en 2026.
Une « hausse dans la baisse » pour cette taxe locale qui continuera malgré tout pour les entreprises ayant un CA important.