Loi de finances 2023 : quels impacts sur le logement social ?
Bailleurs sociaux : quels sont les changements qui vous concernent en 2023 ?
La loi de finances 2023 publiée le 31 décembre 2022 apporte avec elle des mesures fiscales impactantes pour le secteur de l’immobilier et notamment pour le logement social en France. Historiquement favorable au secteur, la loi de finances de 2023 s’est inscrite dans la lignée des précédents dispositifs pour apporter des correctifs favorables pour les bailleurs sociaux. Emmanuel Dijoux, fiscaliste spécialiste du logement social chez Loré, décrypte les changements apportés par cette loi pour les propriétaires.
Les dispositifs pour favoriser la rénovation énergétique des logements
La loi de finances 2023 s’inscrit dans une démarche en faveur de l’environnement et de la transition énergétique comme le démontre l’une des mesures phares : le doublement du déficit foncier. « Cette mesure vise à encourager les propriétaires hors bailleurs sociaux à effectuer des travaux de rénovation pour que les logements atteignent des classes d’énergie allant de A à D », explique Emmanuel Dijoux. Le déficit foncier généré par ces dépenses pourra être imputé au revenu foncier des bailleurs à hauteur de 21 400 euros au lieu de 10 700 euros auparavant.
Du côté des DOM, les bailleurs sociaux sont aussi avantagés, car l’obligation de fin des travaux de réhabilitation des logements sociaux permettant de bénéficier d’un crédit d’impôt, a été fixée à 2029 au lieu de 2025. « Cette mesure permettra aux bailleurs sociaux d’outre-mer d’adapter leur Plan stratégique de patrimoine (PSP) étalé sur 10 ans en matière de réhabilitation. » précise l’expert fiscaliste.
En 2023, les bailleurs sociaux et les promoteurs bénéficieront d’un crédit d’impôt 1 pour 1 pour les nouvelles livraisons de logements intermédiaires. Ce changement vient remplacer l’exonération pour les opérations bénéficiant d’un taux de TVA réduit. L’expert met en garde les propriétaires : « L’évaluation de la taxe foncière, et plus particulièrement en présence de locaux mixtes, sera déterminante car le crédit d’impôt se déclare sur la liasse fiscale de l’année suivante au titre de l’exercice concerné. ».
Les exonérations en faveur de la création de logements sociaux et de constructions vertueuses
Qu’il soit question de recyclage de friches ou de sols contaminés, les collectivités ont la possibilité d’exonérer de la taxe d’aménagement les constructions vertueuses. Cette taxe d’aménagement a par ailleurs été augmentée de 8 %. Pour pallier ce manque à gagner, les communes auront la possibilité de dépasser les plafonnements fixés sur certaines taxes. « Le plafond fixé à 5 000 euros pour la taxation des emplacements de stationnement, par exemple, pourra atteindre jusqu’à 6 000 euros », prévient l’expert. La loi de finances prévoit aussi de compenser la perte pour les communes d’une majoration de la dotation de fonctionnement qui sera, quant à elle, ponctionnée sur une augmentation de la taxe sur le tabac.
Dans cette loi de finances 2023, le législateur s’est montré clément envers les bailleurs sociaux en prolongeant d’un an, jusqu’au 31 décembre 2023, le régime d’exonération des plus-values d’immeubles cédés en faveur du logement social. Sont donc visés par l’article 150 U du Code Général des impôts les cessions à titre onéreux intervenues entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2023 et réalisées au profit :
- d’un organisme d’habitations à loyer modéré,
- d’une société mixte gérant des logements sociaux,
- de l’association Foncière Logement,
- d’un organisme agréé.
Le taux d’abattement de certaines cessions pourra atteindre jusqu’à 85 %.
À noterLa première partie de la loi de finances 2023 concerne les mois allant de janvier à avril durant lesquels les constructions nouvelles de logements sociaux respectant 4 des 5 critères environnementaux listés au 1384 A bénéficient d’une exonération de taxe foncière de 25 ans. À partir du mois d’avril 2023, les nouvelles constructions devront être sur-performantes et présenter des critères allant au-delà de la réglementation environnementale de 2020, et pourront bénéficier d’une exonération de taxe foncière allant jusqu’à 30 ans. L’expert en fiscalité prévient les bailleurs : « Le nécessaire devra avoir été fait en amont des appels d’offres pour bénéficier d’une exonération de taxe foncière de 5 années supplémentaires ». |
L’extension de la taxe d’habitation en réponse à la crise du logement
Si la taxe d’habitation pour les logements principaux disparaît, celle relative aux résidences secondaires ou locaux professionnels non assujettis à la CFE demeurent. Afin de répondre à la problématique du logement, le législateur acte la redéfinition des zones tendues. Selon l’expert, ce changement résulte d’une volonté du gouvernement de pallier le manque de foncier et d’inciter les propriétaires à mettre en location leurs biens. Emmanuel Dijoux précise que cette mesure vient « prendre en compte la notion de résidence secondaire, pour inclure certains territoires dans le périmètre. Environ 4 000 nouvelles communes pourront instaurer une taxe sur les logements vacants, en plus de la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. ».
À noterAfin d’éviter une taxation inutile, les propriétaires ayant de nombreux logements comme les bailleurs sociaux ou les foncières immobilières qui pourraient être assujettis à la taxe sur les logements vacants devront identifier précisément les locaux concernés. L’erreur dans la déclaration des locataires pourrait conduire à une imposition sur la taxe des logements vacants au-delà d’une année de vacance. Pour rappel, les bailleurs sociaux sont exonérés de cette taxe pour les logements conventionnés. |
Le report de la révision des valeurs locatives
L’un des faits marquants de la loi de finances 2023 est le report de deux ans de la révision des valeurs locatives pour une application en 2028. La valeur locative cadastrale correspond en théorie au loyer annuel théorique que pourrait percevoir un propriétaire s’il mettait son bien en location dans des conditions normales de marché.
Emmanuel Dijoux insiste également sur le rôle fondamental des propriétaires dans l’évaluation de la valeur locative. Il porte leur attention sur l’importance de déclarer avec attention les locataires en place et les loyers car « la récolte d’information n’est pas encore suffisante pour établir ce qui servira de base au calcul de la taxe d’habitation, de la taxe foncière ».
L’actualisation des valeurs locatives pour les locaux professionnels aura, elle aussi, lieu en 2025 seulement.
Extension de la taxe sur les bureaux : quels sont les départements concernés ?
Pour les propriétaires de bureaux, la taxe sur les bureaux ne concerne plus uniquement l’Île-de-France, mais est désormais applicable aux départements des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes. Chaque département établit des taux spécifiques à ces taxes. Les propriétaires de bureaux qui se situent dans l’un de ces départements doivent déclarer les surfaces et se préparer à régler une nouvelle taxe.
Concrètement, quels changements pour les déclarations en 2023 ?
Pour les propriétaires de logements, les déclarations de locataires et de loyers se feront sur la plateforme Gérer mes biens immobiliers (GMBI). Emmanuel Dijoux conseille de « s’approprier l’outil afin de ne pas commettre d’erreur au moment de la déclaration des locataires, mais surtout des loyers qui serviront de base locative pour les nouveaux calculs en 2028 ».
L’expert Loré nuance tout de même cette évolution numérique : « Les documents justifiant les exonérations de longue durée ne pourront être transférés sur cette plateforme et devront être transmis par courrier ou mail. ».
À noterEn 2023, les propriétaires ont l’obligation de déclarer uniquement les changements de locataires qui sont intervenus au 1er janvier. Le délai pour effectuer cette déclaration est porté jusqu’au mois de juillet 2023. Ces déclarations permettent à l’administration fiscale d’évaluer le montant de la taxe d’habitation qui aurait dû être prélevée. |
Concernant la taxe foncière, la valeur locative étant indexée sur l’inflation à plus de 7 %, elle doit donc augmenter de 7 % au minimum. Les communes ou autres EPCI auront la possibilité de modifier le taux librement, « le report des révisions de cette valeur locative en 2028 reste bénéfique aux propriétaires » rappelle Emmanuel Dijoux.